Cérémonie de signature actant la naissance du Dispositif égalité-emploi

Ouverture de la cérémonie de lancement de la plateforme « Egalité-Emploi » et signature des premières conventions
Mercredi 23 novembre 2016, 18h
Hôtel de Lassay

 

Mesdames les ministres,
Mesdames et messieurs les parlementaires, chers collègues,
Mesdames et Messieurs les dirigeants d’entreprise
Mesdames, Messieurs, Chers amis,
Monsieur le délégué interministériel pour l’égalité des chances des Français d’outre-mer, cher Jean-Marc Mormeck,

Je suis heureux de vous accueillir ce soir à l’Hôtel de Lassay, pour le lancement de la plateforme « Egalité-Emploi ».
Je le suis d’autant plus que votre projet, cher Jean-Marc, m’est spécialement cher. Lorsqu’il m’a été présenté, je n’ai d’ailleurs pas hésité une seconde : d’emblée, j’étais conquis !
C’est peut-être parce que, député d’un territoire particulièrement touché par les discriminations – la Seine-Saint-Denis –, le sujet trouve chez moi une résonance singulière.
Mais, quelles que soient les différences entre les territoires, c’est surtout à un problème fondamental de notre pacte républicain que s’attaque ce projet : les discriminations, et en particulier les discriminations à l’embauche.

Le Défenseur des Droits, qui a repris et renforcé les compétences de la HALDE, faisait état dans son rapport 2013 que, parmi les saisines relatives à la discrimination, près de 65 % sont liées à l’emploi, loin devant la formation ou le logement, et près de la moitié d’entre-elles sont liées à l’origine ou à la religion, loin devant le handicap, l’âge ou le genre.
Ces discriminations sont un véritable scandale républicain, car l’égalité des chances est la grande promesse de la République. Et pourtant, aujourd’hui encore, la naissance continue à peser d’un poids très lourd sur les possibilités de réussite future.
L’origine sociale, la consonance des noms, la couleur de la peau : tous éléments dont l’individu concerné n’a ni la charge ni la responsabilité, mais qui continuent malgré tout à l’entraver. Comment peut-on l’accepter ?

Toutes les discriminations sont inacceptables. Mais les discriminations à l’embauche sont peut-être spécialement intolérables, parce qu’elles mettent en péril la promesse républicaine sur la durée.
La cohésion sociale passe par l’emploi ; on sait que le chômage est facteur de pauvreté, mais aussi d’exclusion. En outre, ce sont les jeunes qui sont les plus touchés par ces discriminations. Quelle image de l’avenir cela nous renvoie-t-il ?

Plus on discrimine, plus on exclut, plus on dresse les Français les uns contre les autres ; plus on attise les haines, mais aussi les rancœurs, et on détruit l’espoir qui est le moteur de l’action.
C’est une véritable tragédie pour notre société, qui apparaît ainsi irrémédiablement divisée. Elle apparaît également pessimiste : de telles représentations, au lieu de promouvoir l’émancipation individuelle, enferment les personnalités dans des définitions préétablies, dans des carcans qui, pour être des prisons de pensée, n’en sont pas moins des prisons. Et surtout, elle donne l’image d’une société injuste, ce que nous ne pouvons accepter.

Beaucoup, heureusement, ne le tolèrent pas. Depuis des décennies, la lutte antiraciste combat ces idées éculées, et je suis fier de prendre au quotidien ma part de ce combat.
Voilà trente-cinq ans que nous nous attaquons à ce problème. Il y a eu des succès. Beaucoup a été fait, notamment en termes de sensibilisation. Depuis la loi « Roudy » du 13 juillet 1983, qui la première a introduit les notions d’égalité de traitement et d’égalité des chances dans le Droit français, à la Charte pour la promotion de l’égalité et la lutte contre les discriminations dans la fonction publique du 17 décembre 2013, les initiatives ont été nombreuses…

Alors, comment expliquer que de telles inégalités subsistent encore ? Que les CV soient triés selon le prénom du postulant plutôt que ses qualifications ? Que l’embauche soit orientée par la couleur de la peau plutôt que par la compétence ? Que l’origine territoriale, sociale, raciale, soit considérée comme un élément de candidature au même titre que les aptitudes acquises ?
Pour certains d’entre nous, de telles réactions paraissent caricaturales, et même carrément incroyables. Mais elles sont une réalité bien tangible pour trop de jeunes encore.
Savez-vous qu’à CV égal, un candidat perçu comme étant issu de l’immigration a 40% de chances de moins qu’un candidat perçu comme « natif » d’être retenu pour un entretien ?
C’est un différentiel énorme !

Malgré les avancées obtenues depuis quelques décennies, le racisme demeure prégnant dans notre pays. Et les premiers à en faire les frais sont souvent les ultramarins présents dans l’hexagone.
C’étaient d’abord vers eux, cher Jean-Marc, que vous vous êtes orienté, conformément à la mission que vous a confiée le Premier ministre.
Mais il ne vous a pas fallu longtemps pour constater qu’en réalité, l’ensemble des jeunes issus des quartiers « politique de la ville » est frappé de la même infamie : l’impossibilité d’accéder à une première expérience professionnelle, ce qui laisse leur CV dramatiquement vierge et empêche l’inclusion sociale par le travail et le mérite individuel.
Face à un problème d’une telle ampleur, et conscient de l’immensité de l’enjeu, vous avez décidé d’attaquer le problème à la source. Ce n’est pas une question d’équité, mais tout simplement d’égalité de droits, qu’il faut rendre réelle.

C’est l’objet de la plateforme que nous lançons aujourd’hui : ouvrir à ceux qui en sont injustement privés la possibilité d’avoir un premier stage, une première formation, une première expérience. D’entrer, tout simplement, dans la vie active.
Le diagnostic est le bon. Encore faut-il trouver les moyens adéquats pour y répondre.

Avec cette plateforme, j’estime que vous proposez un outil totalement adapté : un dispositif unique, centralisé, fondé sur le volontariat, qui rapproche les entreprises des jeunes, avec l’appui du réseau associatif animé par votre délégation interministérielle. Car on le sait, il ne suffit pas de proclamer un principe pour le faire vivre.
Non, il faut accompagner sa mise en œuvre, à chaque étape. La force de cette plateforme, c’est aussi de ne pas abandonner le jeune à lui-même face à une immense « bourse d’emplois » : au contraire, chacun est accompagné et orienté par des spécialistes.

Le cas échéant, il peut même être formé. Car il y a des barrières que l’on ne voit que lorsqu’on est du mauvais côté : savoir se présenter, comprendre les contraintes de cet exercice intimidant qu’est un entretien d’embauche, est loin d’être une évidence pour tous, et tous les jeunes n’ont pas derrière eux un proche, un parent expérimenté pour les aider à se préparer. Le rôle de la République, c’est bien de s’assurer que l’égalité est un principe vivant, et par le fait de donner à chacun les moyens de réussir.

Cette plateforme ne serait rien sans ceux qui l’animent, et je remercie l’ensemble des entreprises représentées ici d’avoir immédiatement répondu à l’appel de Jean-Marc Mormeck. Pour beaucoup d’entre vous d’ailleurs, ce n’est pas la première fois que vous faites la preuve de votre engagement social. C’est l’honneur de vos dirigeants que d’avoir compris, les premiers, que la diversification du recrutement est aussi un formidable levier pour la créativité, le développement et l’essor des entreprises.

Je remercie la BRED-Banque Populaire, le groupe Canal +, Coca-Cola, McDonald’s, la CAF du Val-de-Marne, Danone, EDF et son PDG Jean-Bernard Lévy, la FNAC et Alexandre Bompard, Orange, MCRA , la SNCF, Véolia, Vulcain Ingéniérie et XL Airways, d’être ici ce soir. Je salue enfin le soutien de la CGPME, qui ne recule jamais devant un défi afin que le marché du travail soit un espace qui inclut plus qu’il n’exclut.
Celui que nous relevons aujourd’hui est tout simplement de faire vivre la promesse républicaine.

La France n’est jamais plus belle ni plus forte que quand toute la diversité de ses visages s’assemble, pour former une image animée et tournée vers l’avenir. Et si nous nous engageons, c’est pour que ce bel idéal ne reste pas lettre morte : La République est une promesse vivante !

Je vous remercie.