Ouverture de l'Atelier co-écologique de La Fabrique Ecologique

Ouverture de l’atelier co-écologique de La Fabrique Ecologique
Lundi 9 février 2015 à 18h – Hôtel de Lassay

Monsieur le Président de La Fabrique Ecologique, cher Géraud GUIBERT,
Madame la Vice-présidente, chère Lucile SCHMID, qui avez présidé les travaux qui nous réunissent ici ce soir,
Mesdames et Messieurs,

Bienvenue à l’Assemblée nationale. Vous êtes ici chez vous.

À vous tous, je veux dire combien je suis heureux de vous accueillir ce soir à l’occasion de la publication de la note sur la résistance française à l’écologie, et de pouvoir mettre en lumière vos travaux.

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Avant d’insister sur l’importance du sujet d’aujourd’hui, je tiens tout d’abord à vous saluer, mon cher Géraud GUIBERT.

Vous présidez et avez contribué à la naissance de La Fabrique Ecologique, comme plus tôt vous avez fondé le pôle écologique du Parti socialiste.

Combien de consciences avez-vous éveillées à l’importance de l’écologie ? De nombreuses au sein de votre organisation politique, je le sais, et vous continuez désormais de le faire auprès de tous les citoyens grâce aux travaux de la Fabrique Ecologique.

La Fabrique Ecologique… quelle belle idée ! Fabriquer de la pensée écologique pour moderniser l’économie et la société, et pour les engager vers un nouveau modèle de développement. Celui qui doit être le nôtre au XXIème siècle !

Si j’ai accepté de recevoir et d’ouvrir un atelier co-écologique, c’est que la démarche m’a séduit.
-    Tout d’abord, votre fondation est pluraliste et transpartisane, rassemblant des gens qui viennent d’horizons divers. Au vu de l’urgence climatique et environnementale, qui hypothèque l’avenir des générations futures, les questions écologiques doivent en effet transcender les clivages partisans.
-    Par ailleurs, vous avez posé comme autre principe fondateur que de la diversité naissent les idées innovantes.

Les méthodes de La Fabrique Ecologique sont donc ouvertes sur la société, et prennent en compte la parole citoyenne.

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« L’écologie peut-elle transformer positivement le modèle français ? ». Je laisse le soin au groupe de travail de présenter ses travaux, mais je voudrais, avant de lui laisser la parole, insister sur quelques enseignements et propositions qui ont retenu mon attention.  

Vous faites un diagnostic très intéressant de la place de l’écologie dans la société et dans le modèle français, en analysant son poids dans les administrations, dans les institutions et dans les discours politiques. Vous dressez un bilan et une évolution de cette place en éclairant notre présent à la lumière du passé.

Si cela va dans le bon sens, si la société française est de plus en plus sensible aux enjeux environnementaux, si les initiatives et l’intégration de la dimension écologique dans les projets se multiplient dans les territoires ou dans les entreprises, les résistances à l’écologie sont encore importantes en France.

En matière d’écologie, nous sommes confrontés à des paradoxes.

Ainsi, la Charte de l’environnement a valeur constitutionnelle depuis 2005 ; le Conseil économique et social est devenu le Conseil économique, social et environnemental en 2008 ; les secteurs de l’écologie et de l’équipement ont fusionné pour créer ce grand ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie – on a même unifié le corps des Ponts et

Chaussées et le corps des Eaux et Forêts !

Ainsi, on a organisé un grand débat national sur la transition énergétique ; le projet de loi qui en a découlé est actuellement en cours d’examen au Parlement et affirme des objectifs ambitieux en termes de développement d’énergies renouvelables ou de diminution de la consommation énergétique.

Et pourtant, l’écologie est malheureusement encore trop souvent vécue comme une politique sectorielle aux côtés d’autres, voire comme une politique secondaire ou un luxe qu’on ne peut pas s’offrir en temps de crise et qui doit être relégué après les priorités économiques et sociales, à l’image de l’alimentation bio qui reste l’apanage de quelques privilégiés.

Il reste par conséquent du chemin à parcourir pour aboutir à ce grand sursaut où chacun comprendra que l’écologie est

LA SOLUTION pour résoudre la crise aux nombreux visages que nous traversons : économique, sociale, environnementale et même démocratique. La transition écologique a toute sa place dans la réponse que nous devons apporter durablement.

Pour réussir – et vous l’avez très bien démontré – l’écologie doit être transversale. Elle ne doit plus être une direction distincte au sein de l’entreprise ou une politique publique à part, mais bien être au cœur de la stratégie, au cœur même du modèle économique et social, et être la clé qui ouvre toutes les portes, qui guide tous les choix. Tant que la pensée unique considérera que l’écologie est un domaine à part, nous ne pourrons pas réussir collectivement et globalement la transition écologique.

Il faut décloisonner. L’écologie doit être au quotidien, dans tous les domaines de notre société, comme facteur de développement. Comment cela doit-il se décliner ?
-    dans l’éducation par exemple : nous devons adopter de nouveaux modes de vie, mais si nos formations n’évoluent pas, nous ne pourrons pas changer les comportements.
-    ou bien dans nos instruments de mesure : le PIB est un indicateur utile mais incomplet, qui ne révèle pas l’accroissement des inégalités sociales ou les dommages environnementaux.
-    ou encore dans notre fiscalité : celle-ci est un instrument, comme l’innovation technique. Il ne s’agit pas d’ajouter de la fiscalité écologique, mais de revoir globalement le régime fiscal.

Cher Géraud, nous avons un ami commun, Philippe MARTIN, qui résume cela en disant que tous les ministres doivent être des ministres de l’écologie.

Comme vous le préconisez, pour vaincre les résistances, c’est un profond bouleversement qui est nécessaire. Il se passe des tas de choses sur le terrain. Mais il faut penser la généralisation et libérer les énergies. Il nous faut partir des pratiques sociales pour organiser les liens entre l’écologie et le modèle français.

Enfin et surtout, il faut organiser une démocratie écologique où l’on revoit les modes de consultation et de décision citoyens dans les territoires, où le dialogue environnemental est au même niveau que le dialogue social, avec les questions de représentativité qui en découlent, où les écologistes n’ont certes pas le monopole de l’écologie mais où ces questions sont toutefois portées avec une majorité politique élargie.

Vous avez eu le courage de poser toutes les questions, d’étudier toutes les pistes et de ne craindre aucun tabou. C’est ainsi que vous vous interrogez comme moi sur une autre manière de faire fonctionner les institutions, pour réussir le changement et pour apporter les bonnes réponses aux crises multiples qui nous secouent.

La question des institutions, tout comme les questions écologiques, ne sont pas secondaires face à l’urgence économique, car il ne peut y avoir de réponses que collectives, aux problèmes que traverse un pays. Il nous faut identifier ce que devraient être les institutions françaises au XXIème siècle pour répondre aux défis environnementaux, aux enjeux de long terme et au nouveau modèle de développement qu’il nous faut construire.

Réformer le fonctionnement de nos institutions donnerait un signal fort que l’écologie est désormais au cœur des politiques publiques, de façon transversale, et en serait le garant. J’ai lancé une mission sur l’avenir de nos institutions il y a plus de deux mois et j’ai l’honneur de la co-présider avec l’historien Michel WINOCK. Nous avons justement consacré la réunion de jeudi dernier à nous interroger sur la démocratie environnementale et son articulation avec la démocratie représentative.

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Alors, oui, soyons créatifs, soyons ambitieux et audacieux, innovons. Car analyser aujourd’hui, c’est espérer le changement pour pouvoir le réaliser demain et pour progresser.

Pourquoi s’interdire ces changements ? Faisons ressentir à nos concitoyens que rien n’est trop difficile ou insurmontable pour eux. Cela nous donne le courage de continuer pour lutter contre toutes les fatalités. Cela nous donne la force de mener cette bataille culturelle. En tout cas, sachez que, comme toute personne qui pense, comme toute personne qui veut mettre ses idées au service de l’intérêt général, vous êtes ici chez vous.

Je vous remercie.