Cérémonie en l’honneur du Général Gerbault
Hôtel de Lassay, le 29 juin 2016
Mon général, madame,
Monsieur le Président,Bernard Accoyer,
Mesdames et messieurs les députés,
Messieurs les officiers généraux,
Mesdames, Messieurs, en vos grades et qualités,
Mesdames, Messieurs,
Nous sommes réunis aujourd’hui pour célébrer plusieurs événements en un, cher Philippe Gerbault.
Tout d’abord les plus fins observateurs auront remarqué les étoiles sur votre képi et sur vos épaules qui signalent votre promotion au grade de général, promotion qui vient couronner une carrière riche et méritante. Mais aussi votre départ du palais Bourbon, après dix années de loyaux services.
Et enfin votre retraite, puisque vous quittez non seulement l’Assemblée nationale mais aussi la gendarmerie et plus globalement le monde militaire.
Il me revient donc l’honneur, en tant que votre dernière autorité d’emploi comme on dit dans le jargon, de retracer vos mérites, de relater vos faits d’armes et de brosser le portrait de l’homme que ne saurait cacher l’uniforme.
Vous avez grandi à Dijon, dans une famille marquée par la guerre. Votre père, envoyé en Allemagne dans le cadre du service du travail obligatoire, s’évade à trois reprises et ne doit son salut qu’à son courage. Il vous lègue donc très tôt sens de l’honneur et bravoure. Il vous lègue aussi l’amour de l’histoire, lui qui collectionne les objets de la période empire ; j’y vois la source de votre motivation à faire carrière au service de la défense de la Nation, mais aussi l’explication de votre impressionnante collection d’ouvrages d’histoire militaire.
C’est dans ce contexte que vous arrivez à St Cyr, et que s’ouvre le premier chapitre de votre vie professionnelle, avec une affectation dans l’infanterie.
En 1983 vous servez au sein des forces onusiennes au Liban, puis s’ouvre le deuxième chapitre de votre vie professionnelle : vous êtes reçu au concours d’officier de la gendarmerie nationale. A l’issue de la formation, vous rejoignez pour la première fois la garde républicaine, avant d’être affecté à La Réunion, en tant que commandant de compagnie. Cette expérience dans l’hémisphère sud vous vaut d’être distingué dans l’ordre de l’étoile de Moheli, sans doute la plus exotique des nombreuses distinctions qui vous ont été décernées au cours de votre carrière.
Vous revenez en métropole et « déroulez » une carrière diversifiée d’officier de gendarmerie. Au gré des affectations, vous re-découvrez le Puy de Dôme, l’Aube et enfin Paris, pour re-trouver la garde républicaine. De ces années de commandement, vos supérieurs et collaborateurs retiennent votre engagement sur le terrain, votre disponibilité sans faille, votre sens de l’anticipation. Vous passez quelques mois au conseil supérieur de la réserve militaire, où vous participez aux travaux préparatoires des nouvelles lois sur la Réserve.
Et c’est en 2006 que s’ouvre le troisième chapitre de cette carrière professionnelle, lorsque vous êtes nommé commandant militaire du palais Bourbon.
J’aurais pu présenter cette nouvelle étape comme une découverte du monde législatif mais en réalité vous connaissez déjà la représentation nationale, d’un point de vue généalogique du moins, puisque votre épouse compte parmi ses ancêtres pas moins de trois députés.
Pendant ces dix années de commandement militaire de l’Assemblée nationale, vous avez eu à cœur de développer une culture de la planification, de l’anticipation et de la gestion des crises.
D’ailleurs, des crises, vous avez eu à en connaitre un certain nombre, dont je dois dire, pour celles que j’ai vécues à vos côtés, que votre sang froid et ce sens de l’anticipation vous ont toujours permis de les dominer. Vos invités vont comprendre dans un instant l’origine des mesures draconiennes de filtrage mises en place aujourd’hui.
Car en 10 ans vous avez connu un nombre relativement important de tentatives d’envahissement, donnant lieu à un concours d’ingéniosité. Il y eut ceux qui tentèrent de passer par-dessus les grilles, une nuit d’avril 2006, pour manifester contre le CPE.
Il y eut ceux qui usèrent de dissimulation pour assister aux séances comme public et finalement les troubler, en mai 2006 par exemple, à l’occasion de l’examen de la loi pénalisant la négation du génocide arménien. Il y eut la tentative audacieuse d’intrusion par les toits, à l’aide d’une grande échelle de pompiers, de militants du mouvement Greenpeace. Et il y eut les étudiants anesthésistes qui s’infiltrèrent chez nos voisins du quai d’Orsay pour tenter d’escalader nos murs.
A ces situations exceptionnelles, il faut ajouter les missions d’honneur, à l’occasion des voyages d’Etat de Présidents étrangers, mais aussi l’organisation dans de bonnes conditions de sécurité des congrès à Versailles.
Dans chacune de ces situations, j’ai pu mesurer votre professionnalisme, votre calme, votre capacité d’anticipation. La présence de Bernard Accoyer parmi nous ce soir montre qu’il en fut de même pour mes prédécesseurs.
Les fonctionnaires de l’Assemblée ici présents pourront également témoigner de la pédagogie dont vous avez fait preuve pour développer une culture d’exercices et de mise en situations.
Vous avez même anticipé les situations les plus critiques en faisant venir le GIGN pour simuler une attaque au cœur de notre démocratie.
Je me souviens bien du scénario : il s’agissait d’une prise d’otage dans l’hémicycle par un « collectif anti-tout ».
Je revois parfaitement les visages des fonctionnaires et des huissiers, malmenés par les faux terroristes. Et enfin le dénouement, c’est-à-dire l’équipe d’intervention qui réussit à entrer et à libérer les otages. Mon seul regret : nous, parlementaires, n’avions pas été autorisés à jouer notre propre rôle… soit les gendarmes du GIGN se sont fait une fausse idée de notre moyenne d’âge, soit ils ont eu peur que nos meilleurs orateurs coupent la parole à leur négociateur !
En clair, vous avez réussi la mission qui vous avait été confiée il y a dix ans, de réformer la conception de la résilience du palais Bourbon, avec des moyens modernes et efficaces, avec des équipes entrainées.
Voilà retracés vos missions et vos mérites. Je suis très heureux qu’ils puissent se traduire par cette nomination au grade d’officier général, effective depuis hier.
Ces étoiles sur l’uniforme illustrent ainsi la reconnaissance de la Nation pour vos bons et loyaux services.
Elles vous accompagneront pour l’épilogue de votre carrière, dont j’ai cru comprendre que vous entendiez bien le remplir en explorant les possibilités qu’offre le monde « civil », comme disent les militaires, en matière de sécurité et de sûreté.
La retraite vous permettra également de consacrer plus de temps à celle qui vous a suivi dans vos affectations, votre épouse Guillemette, et je veux également lui rendre hommage car être femme d’officier est souvent synonyme de sacrifices professionnels et d’attentes. Quelques indices me donnent à penser que la défense de nos concitoyens est même devenue une passion familiale… car en effet vos deux filles, Audrey et Anne-Laure, ont choisi d’épouser des officiers, et votre fils, Claude-Louis, est lui-même officier dans la marine.
Mon général, je vous adresse mes vœux les meilleurs pour cette retraite qui, je l’espère, vous apportera également repos et moments en famille.