Congrès de l’ARF à Nantes
Jeudi 19 septembre 2013
Monsieur le Président, cher Alain,
Cher Jacques,
Mesdames et Messieurs les Présidentes, et les Présidents,
Monsieur le Préfet,
Merci de m’accueillir pour ce nouveau congrès des Régions de France.
L’année dernière, les aléas des transports m’avaient empêché d’être parmi vous, aussi je suis particulièrement heureux de pouvoir honorer cette invitation aujourd’hui.
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L’année dernière, vous débattiez sous la bannière « Décentralisation, l’heure des régions ». Cette année, le thème de votre congrès est « Décentralisation, partageons l’avenir ! ».
C’est donc de l’avenir dont nous parlons ce matin. De l’avenir de la France. De l’avenir de notre pays dans ce nouveau monde.
Et pour que la France réussisse dans ce nouveau monde, elle a un pari, un seul, à relever. Ce pari, c’est le pari de la croissance.
Pas la croissance comme une fin en soi. Une croissance qui conjugue dans le même temps recherche et innovation, progrès social et respect de l’environnement.
Une croissance comme condition sine qua non pour relancer la machine à emploi et inverser la courbe du chômage.
Une croissance pour relancer la consommation et le pouvoir d’achat des ménages.
Une croissance pour offrir à tous les Français les conditions d’une vie digne en faisant reculer les inégalités.
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Et j’en suis convaincu, pour renouer avec la croissance, tous les acteurs doivent être mobilisés, du plus petit village, à la plus grande métropole.
Dans cette mosaïque France, les territoires sont en première ligne pour relancer la croissance.
Chacun de nous ici, connaît la force des collectivités, qui lorsqu’elles sont administrées par des élus ayant l’autonomie nécessaire pour prendre des décisions et les mettre en place, réussissent et contribuent au développement du pays.
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Alors que la croissance connaît un frémissement, que nous sortons de la récession, le rôle des territoires est plus central que jamais.
Pour confirmer cette tendance, c’est toute la force publique qui doit être mobilisée.
Pour y parvenir, la France doit faire le choix de la décentralisation. Pour permettre à chaque village, à chaque ville, à chaque département, à chaque région, d’avoir l’espace nécessaire pour agir.
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La décentralisation, ce grand sujet qui année après année nous mobilise, j’y viens.
Je crois qu’en France, une ambivalence existe sur le principe même de la décentralisation.
Rappelons-nous. Il y a 30 ans, les premières lois de la décentralisation étaient adoptées. Celles-ci nous ont permis de faire de nos collectivités, au-delà de nos sensibilités, des outils pour réparer, protéger et progresser. Partout les investissements d’avenir ont été pilotés par les élus locaux.
Néanmoins, 30 années ont passé et chacun le reconnaît, le modèle institutionnel français, très largement d’inspiration jacobine et centralisatrice, est encore trop bloqué. Pourquoi ? Peut-être et avant tout parce que l’Etat ne s’est jamais vraiment adapté à la nouvelle architecture décentralisée de notre pays. Peut-être aussi parce que culturellement, nous avons du mal à accepter cette « révolution » territoriale.
Aussi, nous devons dès aujourd’hui modifier les comportements et les attitudes pour ancrer la décentralisation dans les esprits.
Vous avez choisi de dialoguer pendant deux jours avec tous ceux qui constituent vos principaux partenaires et interlocuteurs au quotidien : les autres collectivités, les syndicalistes, les chefs d’entreprises, les universitaires, les enseignants, chercheurs, experts, intellectuels… et les représentants de l’Etat. C’est une très bonne stratégie.
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Comme vous, je pense qu’il faut libérer l’énergie des territoires pour construire un nouveau pacte de la République décentralisée.
Bien sûr, une nouvelle étape de la décentralisation est proposée par le Gouvernement et il faut s’en réjouir, même si le texte qui traite précisément du volet régional ne sera en discussion au Parlement qu’en 2014.
Mais ici, je voudrais vous dire combien je souhaite qu’un nouveau pacte de confiance voie le jour entre l’Etat et les collectivités.
Un nouveau pacte de confiance, clarifiant les missions de chacun pour relancer la croissance, ancrer la solidarité, pérenniser les services publics et garantir l’efficacité des politiques publiques.
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Comme Président de l’Assemblée nationale, je le martèle, l’emploi doit guider nos décisions. Car c’est par l’emploi que renaîtra la confiance.
Mais, je le sais comme vous, pour permettre aux régions d’agir efficacement dans la bataille de l’emploi, leur compétence économique doit être mieux organisée.
Vous le rappelez souvent : la première compétence de la région, c’est la compétence économique. C’est même pour cela que les régions ont été créées au milieu des années 50, avant même de devenir des collectivités territoriales.
J'ai rencontré de nombreux responsables économiques - dirigeants de grands groupes, PME, entreprises de taille intermédiaire - qui me l'ont affirmé : ils ont besoin des collectivités territoriales, pas seulement pour les aides et les subventions, mais parce que leur connaissance du territoire, de leurs concitoyens, des marchés de l’emploi, des formations, en font des partenaires essentiels.
Cela se vérifie dans tous les domaines, de l’industrie aux services, de l’aéronautique aux transports publics, des énergies renouvelables à la gestion des eaux, même dans le domaine agricole ou dans le luxe. C’est une réalité.
Mais cette responsabilité du développement économique doit être clarifiée car, vous le savez mieux que moi, ce sujet est sensible.
A Nantes par exemple, est-ce au Président de région ou au Président de la communauté urbaine, Nantes métropole, de piloter le développement économique ? Doit-on définir un leader ? Ne faut-il pas mieux laisser les deux collectivités décider entre elles comment elles s’organisent ?
Alors oui, pour l’exercice de leurs compétences économiques et leur soutien à l’innovation, les régions doivent être leaders, même si des adaptations peuvent être trouvées en fonction des réalités territoriales : là une métropole, là un département doivent pouvoir trouver leur place.
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Chers collègues,
Les régions sont en première ligne pour relever le pari de la croissance.
Rien ne pourra se faire sans elles à l’avenir.
Et permettez-moi ici, de vous dire ma confiance dans l’avenir de notre pays
La France a toutes les cartes en mains pour réussir dans ce nouveau monde. Et elle réussira, en étant confiante et conquérante.
La France doit être confiante dans ses potentialités. Je ne supporte plus les prophètes de la décadence et les professeurs en déclinologie, qui nous expliquent à longueur de journée que nous ne sommes pas assez ceci ou que nous sommes trop cela. Qu’il faudrait arrêter d’être nous-mêmes pour copier d’autres pays, d’autres modèles.
Arrêtons de nous dénigrer à longueur de journée ! Soyons un peu plus patriotes ! Retrouvons confiance en nous-mêmes ! Dois-je rappeler la dynamique démographique française, nos réussites en matière d’agroalimentaire, nos PME innovantes, l’engagement des salariés au quotidien dans les entreprises…
Alors il ne s’agit pas d’une confiance béate ou arrogante, mais une confiance éclairée et enthousiaste qui nous permette de regarder droit dans les yeux les atouts qui sont ceux de la France, notamment grâce aux élus locaux qui agissent, aux entrepreneurs qui innovent, aux femmes et aux hommes qui travaillent au quotidien.
Une France confiante, mais surtout une France conquérante.
Je vous le dis, nous avons tous les atouts pour nous projeter conquérants dans la compétition internationale, dès lors que nous prenons les bonnes décisions et que nous entreprenons les trois paris gagnants.
Premier pari, le pari de la stabilité fiscale.
Je disstabilité, je ne dis pasfacilité. Je n’aime pas l’expression « ras-le-bol fiscal ». Moi, j’en ai surtout ras-le-bol du chômage parce qu’il ronge la confiance dans notre pays.
Alors, oui, je refuse de céder à la facilité du discours antifiscal. « Impôt », ce n’est pas un gros mot. C’est la fiscalité qui finance les infirmières, les profs et les policiers.
L’enjeu est surtout de faire en sorte que les Français en aient pour leur argent, c’est-à-dire des services publics nationaux et locaux, de qualité, partout.
En revanche, je suis convaincu qu’une pause fiscale est indispensable. Les Français doivent pouvoir voir au-delà de la fin du mois et les entreprises se projeter dans l’avenir.
Pour cela, la France a besoin de stabilité fiscale. J’ai prévenu dès la mi-août. Budget, PLFSS, retraites : rien ne serait pire que d’appliquer aux Français la triple lame impôts, taxe, cotisations.
Le président de la République a annoncé une pause fiscale. C’est heureux. Elle doit maintenant être respectée et se faire ressentir rapidement et concrètement dans la vie des Français.
Ensuite, le pari de la renaissance industrielle.
Ne laissons jamais s’installer l’idée que notre pays serait le simple musée de l’Europe. Celui que les pays émergents viendraient photographier « en mémoire du temps où »… La France est une grande Nation industrielle qui n’entend pas se résigner au déclin dans la mondialisation.
Une usine qui ferme, une exploitation agricole qui disparaît, c’est un peu de notre souveraineté nationale qui s’en va, c’est un peu de la puissance de la France qui s’éteint. La priorité est de cesser la saignée industrielle qui a entraîné la suppression de 800 000 emplois industriels en dix ans.
Cette renaissance doit passer par la mobilisation de tous les secteurs économiques et ce combat doit être mené sur tous les fronts.
- Un front intérieur: celui de la montée en gamme de nos produits pour permettre à nos industriels d’aller se frotter à la compétition internationale. Et c’est pourquoi je salue la mise en place du CICE, de la Banque publique d’investissement ou encore les efforts en matière de recherche et de développement. Ces instruments sont perfectibles. Il faudra les évaluer et les améliorer. Le Parlement jouera son rôle.
- Un front européenaussi : celui de la réorientation de la politique de l’Union. Nous avons besoin d’une Europe qui protège d’une mondialisation qui trop souvent laisse sur le bas-côté les plus vulnérables. Pas d’une Europe protectionniste, mais d’une Europe qui protège.
Troisième pari, le pari de la transition écologique.
Vous savez de quoi je parle ici dans cette région qui a fait le choix d’une croissance verte et vertueuse, qui investit dans les énergies marines renouvelables.
Je l’ai déjà dit : on peut vivre avec 4% de déficit, pas avec 4 degrés de plus.
Nous avons une responsabilité devant les générations qui viennent. Nous ne prônons pas la croissance zéro ni le retour à l’âge de pierre. C’est même tout le contraire. La France doit être dépositaire du processus de transition écologique et aller à la conquête des emplois verts, ceux-là même qui nous tendent les bras. L'objectif de 100 000 nouveaux emplois verts d'ici 3 ans, c’est possible.
Les régions sur ce dossier sont des acteurs incontournables.
Je le sais, moi qui me suis rendu depuis mon élection dans 15 des 22 régions métropolitaines.
J’ajoute que ce n’est par ailleurs pas un hasard si la transition écologique et énergétique fait partie des cinq grandes priorités identifiées pour les futurs contrats de plan Etat-régions. C’est essentiel.
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Chers amis,
Je le sais aussi, pour que les régions soient exemplaires, elles doivent en avoir les moyens.
Sur ce point, disons-le, les régions ont particulièrement souffert de la suppression de la taxe professionnelle, en perdant quasiment toute autonomie fiscale.
Si nous voulons que vous demeuriez des acteurs majeurs de la croissance et du développement, vous devez disposer des moyens adaptés pour accompagner ces ambitions.
Mais dans le même temps, je connais les contraintes. L’Assemblée nationale commencera dans quelques jours l’examen du budget de la Nation. Nous savons déjà que l’effort global à réaliser se chiffre en dizaine de milliards d’euros.
Cet effort s’impose à tous. Les collectivités y sont prêtes.
Mais nous avons deux exigences.
La première exigence est celle d’une répartition équitable des efforts. Les collectivités accepteront ces efforts si parallèlement une réforme de la fiscalité locale est engagée en cohérence avec celle de la fiscalité nationale.
La seconde exigence est celle du maintien de la capacité d’investissement des collectivités territoriales.
Faut-il le rappeler, les collectivités territoriales contribuent pour près de 70% des investissements publics. Quant aux régions, ce sont près de 10 milliards investis tous les ans. Rien ne doit entraver cela.
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Mesdames et messieurs, j’en termine.
Nous sommes entrés dans un nouveau monde.
La France est à la croisée des chemins.
Ou bien elle subit la mondialisation et son cortège de souffrances, d’inégalités, d’injustices. Et nous savons tous ici quels territoires en souffriront le plus.
Ou bien elle va, confiante et conquérante, à la recherche d’une prospérité nouvelle, qui permette d’en redistribuer les fruits à tous les Français.
C’est ce choix que nous faisons ensemble ce matin.
Le choix du rassemblement de toutes nos forces. Dans les villes et dans les campagnes. Jeunes et anciens. Salariés, artisans, commerçants, chefs d’entreprises, capitaines d’industries. Citoyens électeurs et citoyens élus !
La France a déjà surmonté des crises. Elle saura surmonter celle-ci et trouver sa place dans ce nouveau monde, grâce à l’aide et à l’action des régions.
Je vous remercie.