Discours à la communauté française d'Alger

Visite de M. Claude Bartolone, Président de l’Assemblée nationale

Alger, 9 mars 2013

                                                                                       

Monsieur l’Ambassadeur,
Monsieur le Consul général,
Mesdames et Messieurs les représentants de l’Assemblée des français de l’étranger,
Mesdames et Messieurs les conseillers du commerce extérieur,
Mesdames et messieurs les présidents des associations et entraides françaises,
Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux de l’occasion qui m’est offerte, alors que j’entame ma visite en Algérie, de vous rencontrer, vous qui incarnez dans tout son dynamisme et sa diversité la communauté française en Algérie.

Vous êtes la preuve vivante de la vitalité des relations sans équivalent que nous entretenons avec l’Algérie. Votre communauté est l’une des plus importantes au monde. Elle est aussi l’une des plus diverses et des mieux intégrées.

Je veux d’abord m’adresser à vous, chers compatriotes qui avez fait le choix de rester en Algérie au moment de l'indépendance ou qui y êtes venus par solidarité alors que la République algérienne venait de naître. Vous avez traversé des moments difficiles pendant les années noires, mais vous n’avez jamais abandonné cette terre, soutenus par une population algérienne qui vous a protégés.

Vous représentez la composante de la communauté française la plus symbolique de la relation hors du commun entre nos deux pays. Vous méritez notre respect, notre admiration, mais aussi parfois le soutien des autorités françaises, car beaucoup de vos membres sont aujourd’hui âgés et fragiles.

Je me tourne ensuite vers vous, compatriotes binationaux. Vous cumulez la richesse de la culture française et algérienne. Votre communauté est jeune en majorité, viscéralement attachée à la France, mais vous souhaitez vivre d’une manière apaisée votre double appartenance et votre double identité.

Je m’adresse enfin à vous, compatriotes expatriés venus dans ce pays proche pour y diriger des entreprises, pour y créer des richesses et pour y travailler côte-à-côte avec les Algériens.

L'Algérie est un pays riche, qui se développe de jour en jour et qui a besoin, comme tout pays, d’échanger avec son environnement économique et d’attirer l'expertise étrangère nécessaire pour son développement. Par votre action, votre créativité, vous contribuez à la prospérité de ce pays, l’Algérie, mais aussi au rayonnement de la France.

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Vous le savez, cette relation entre nos deux pays, si singulière et si forte, a récemment connu une relance spectaculaire à l’occasion de la visite d’Etat du Président de la République en décembre dernier. Visite historique à plusieurs titres : première visite du quinquennat, première reconnaissance plénière, par un chef de l’Etat français, des souffrances du peuple algérien et de la responsabilité du système colonial français dans ces souffrances.

Dans ce nouveau climat nos deux peuples ont l’opportunité d’écrire ensemble une nouvelle page des relations franco-algériennes, fondée sur la confiance, le respect mutuel, et orientée vers la relance de nos coopérations. C’est le sens de la « Déclaration d’Alger pour l’amitié et la coopération » signée en décembre par le Président Hollande et le Président Bouteflika, qui constitue notre feuille de route pour les prochaines années à venir.

Dans ce contexte je viens porter un message aux autorités et parlementaires algériens : aller-au-delà des symboles et des échanges protocolaires, travailler au renforcement effectif de nos coopérations.

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La relance permise par la visite d’État n’est donc que le début du chemin. Les visites et les occasions de se concerter seront nombreuses en 2013. Parmi elles, la coopération interparlementaire a tout son rôle à jouer.

Une importante délégation de l’Assemblée nationale participera demain aux travaux de la Grande Commission France Algérie avec leurs homologues de l’Assemblée Populaire Nationale. Je veux souligner le pluralisme de cette délégation, et la connaissance intime, souvent personnelle, de mes collègues parlementaires, des enjeux propres à la rive sud de la Méditerranée, de l’Algérie et de nos compatriotes en Algérie.

Parmi eux notamment, Patrick Mennucci, le Président du groupe d’amitié France-Algérie, et votre représentant à l’Assemblée, le député de la 9e circonscription des Français de l’étranger, Pouria Amirshahi dont je veux saluer l’implication dans le suivi des dossiers franco-algeriens et l’énergie avec laquelle il défend votre voix à l’Assemblée nationale.

Je pense notamment au combat qu’il mène sans relâche pour que les français de l’étranger soient reconnus come des français à part entière et qu’ils n’aient pas à justifier sans cesse de leur nationalité. Je pense aussi aux multiples qu’il a l’habitude d’organiser entre les différentes sociétés civiles qui composent la communauté française en Algérie et qui sont autant de ponts entre ces 2 rives de la méditerranée.

Je veux aussi mentionner la présence à nos côtés de Sylviane Bulteau, de Marcel Bonnot, de Hervé Gaymard, de Rudy Salles et de Alain Tourret.

Je suis convaincu des complémentarités entre la diplomatie gouvernementale et, si je puis l’appeler ainsi, la diplomatie parlementaire : à la première notamment la gestion de l’urgence politique, la coordination de nos appareils administratifs ; à la seconde, la densité des relations interpersonnelles, l’importance accordée à la dimension citoyenne et aux contacts avec la société civile, et la franchise du dialogue entre élus de la nation.

C’est dans cet esprit que nous aborderons demain la session inaugurale de la Grande Commission, en mettant l’accent sur la dimension humaine des relations franco-algériennes et sur l’investissement productif en Algérie et les partenariats PME/PMI.

A côté de la diplomatie parlementaire, l’élu que je suis veut également souligner le rôle particulier de la coopération décentralisée avec l’Algérie. Nombreux sont les jumelages de villes françaises avec des villes algériennes. Nombreuses sont les collectivités territoriales françaises qui mettent en place, en lien avec notre ambassade en Algérie, des projets concrets, impliquant des Français et des Algériens. C’était le cas du Département de la Seine-Saint-Denis, dont j’ai été le président jusqu’en septembre dernier et qui a engagé un partenariat innovant à Oran avec le lancement d’un chantier d’insertion.

Je veux parler ici d’une diplomatie de terrain qui repose plus que toute autre sur la vitalité de la société civile.

Elle peut compter sur l’extraordinaire densité des liens humains et affectifs entre nos deux pays : quelques 1,4 millions de personnes nées en Algérie résident en France, dont près de deux tiers de nationalité française ; de ce côté-ci de la Méditerranée, plus de 40 000 Français sont inscrits sur les registres consulaires, auxquels il faut ajouter les dizaines de milliers de binationaux et de compatriotes qui se déplacent régulièrement d’un pays rive à l’autre.

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 A vous tous ce soir, comme aux responsables politiques et parlementaires que je rencontrerai lors de mon séjour, je veux dire les trois ambitions que nous devons porter ensemble pour la relation franco-algérienne, relation essentielle à la "Méditerranée de projets" qu'à appelé de ses vœux le président de la République.

1- Premièrement, intensifier notre coopération économique et industrielle.

L’Algérie est le premier partenaire commercial de la France en Afrique, et la France est le deuxième investisseur dans le pays. Mais nous le savons, une grande part du potentiel reste inexploité, dans un climat d’affaires souvent difficile.

Un projet de grande ampleur comme celui de l’usine Renault qui verra le jour à Oran n’aurait pas pu se concrétiser sans la confiance retrouvée entre nos deux pays et sans la conviction partagée que l’investissement français en Algérie contribue à diversifier l’économie algérienne, tout en permettant à nos industries de mieux s’insérer dans la mondialisation. L’appui de l’Etat reste, quoiqu’il en soit, indispensable, qu’il s’agisse des grands contrats, des projets d’infrastructure, ou de l’appui au PME/PMI.

Cette dimension ne se résume pas qu'à l'addition de nos intérêts. Il s'agit d'élaborer une stratégie économique et industrielle concertée, fondée sur ce que j'appelle le partage de la valeur ajoutée. Bien des filières - c'est le cas de l'automobile, je viens de l'évoquer - peuvent être tout à la fois localisées en France et en Algérie, au service d'un développement commun. Et des accords fructueux, fondés sur le respect et le partage des compétences, sont possibles, à l'image de la SEAAL (la Société des Eaux et de l'Aménagement d'Alger) qui est une réussite exemplaire en matière de partenariat.

2- Deuxièmement, il s’agit aussi de valoriser la dimension humaine de notre relation :

Je pense en particulier aux projets intéressant la jeunesse, comme la mise en place sur le territoire algérien d’un réseau d’instituts d’enseignement supérieurs de technologie – les équivalents de nos IUT – ou la création d’un Erasmus méditerranéen, ou, pourquoi pas d'un Erasmus francophone. Car cette langue française aujourd'hui nous rapproche. Elle n'est d'ailleurs plus la langue de France, mais une langue en partage qui se parle d'ailleurs plus dans le Monde que dans l'Hexagone. On ne souligne jamais assez la singularité de l'Algérie qui, bien que non membre permanent de l'OIF (organisation internationale de la francophonie), est l'un des pays francophones les plus importants au monde. Cultivons ensemble ce trésor commun, ce "butin" comme l'appelait Kateb Yacine.

En matière de circulation des personnes, les attentes sont fortes des deux côtés et je ne manquerai pas de rappeler les grands efforts entrepris pour faciliter la délivrance des visas et améliorer l’accueil, à une échelle industrielle – plus de 200 000 visas délivrés en 2012. Je ferai aussi valoir les attentes de nos ressortissants en matière d’accès et de séjour en Algérie, eu égard aux perspective de développement de notre relation économique.

Enfin, je suis soucieux que nos jeunes puissent découvrir l'Algérie, acquérir une première expérience professionnelle et contribuer au développement de nos entreprises. L'élargissement des VIE est une piste très intéressante, même s'il est bloqué là aussi par des contraintes administratives dont je parlerai à mon tour avec les autorités algériennes.

3- Troisièmement, relever ensemble le défi de la sécurité et de la stabilité de la rive Sud de la Méditerranée.

Le nouvel âge de la relation bilatérale ouvert par la visite d’État a permis à nos deux pays d’être complémentaires dans la gestion du dossier malien. Nos amis algériens savent que l’opération Serval que la France mène au Mali depuis le 11 janvier combat un danger commun : le terrorisme djihadiste, celui-là même que l’Algérie a combattu dans les années 1990 et qu’il continue de combattre, comme on l’a vu récemment à In Amenas.

Je sais l’émotion et l’inquiétude que cette prise d’otage a suscitées parmi nos compatriotes en Algérie. Je saisis cette occasion pour vous réaffirmer à quel point votre sécurité est notre premier souci et vous assurer que tout sera mis en œuvre pour que le dispositif d’alerte en cas de menace sur la sécurité des Français en Algérie soit le plus fiable et le plus efficace possible.

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Je voudrais terminer mon intervention par un hommage appuyé à tous les Français d’Algérie, à tous nos compatriotes qui vivent aux côtés de ce peuple magnifique qu’est le peuple algérien.  Par votre présence et votre action sur le sol algérien, vous contribuez à faire de la relation de nos deux pays, un exemple d’amitié, de coopération et de confiance

Aux acteurs économiques, aux personnels de nos établissements scolaires autant que ceux de l'Institut français. Aux agents de notre ambassade et de nos 3 consulats dont le rôle n'est pas assez connu ni toujours reconnu en France, je veux exprimer toute ma reconnaissance pour ce que vous faites en faveur du rapprochement entre nos deux pays, et vous assure de mon soutien et de celui des autorités françaises.

Monsieur l’Ambassadeur, Monsieur le Consul général, soyez enfin remerciés, ainsi que vos collaborateurs, pour l’appui apporté à l’organisation de ce séjour.