Promouvoir la culture de la transition écologique - quinzième débat du cycle des Mardis de l’Avenir

Les Mardis de l’Avenir
Promouvoir la culture de la transition écologique
Mardi 2 juin 2015 – Hôtel de Lassay

Monsieur Pierre Rabhi,
Monsieur le Président de la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent, grand mécène des arts et de la culture,
Madame la Ministre, chère Aurélie,
Mesdames et Messieurs les députés,
Mesdames et Messieurs,  Chers amis,

Nous voici réunis ce soir pour la dernière édition des Mardis de l’Avenir de cette session parlementaire. Je souhaiterais remercier toutes celles et tous ceux qui participent fidèlement à ces débats pluralistes sur la transition écologique, depuis maintenant près de deux ans.

En cette année 2015, qui sera celle de la COP21 en France, nous avons souhaité montrer au fil des débats, que pour réussir la transition écologique, l’écologie doit être transversale. Nous avons insisté sur la nécessité de décloisonner. Loin de se réduire à une politique publique à part, elle doit être au cœur même du modèle économique et social. L’écologie est d’abord une question sociale. Car ce sont les plus modestes qui sont les plus touchés par la pollution de l’air, par la précarité énergétique… par les impacts du changement climatique. De fait, nous avons abordé de nombreux thèmes cette année : l’alimentation, la jeunesse et l’éducation, les nouveaux indicateurs de richesse…

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Je souhaitais conclure ce cycle des Mardis de l’Avenir en débattant de la place de la culture dans la transition écologique. Comment la culture peut-elle être un vecteur, voire un accélérateur de la transition écologique ?

La transition écologique ne se résume pas à une nouvelle loi, à de nouvelles mesures fiscales ou aux technologies vertes. Elle s’apparente à une véritable révolution culturelle. Il s’agit de changer nos comportements de tous les jours, nos modes de vie.

Sur ce point, les Français sont majoritairement d’accord : 85 % pensent que c’est d’abord en modifiant de façon importante nos modes de vie que l’on empêchera la dégradation de l’environnement. Pourtant, si la société française est de plus en plus sensible aux enjeux environnementaux, si les initiatives et l’intégration de la dimension écologique dans les projets se multiplient dans les territoires ou dans les entreprises, les résistances à l’écologie sont encore importantes en France.

Or, le monde culturel, autant que les médias, jouent un rôle essentiel dans la formation de la pensée collective citoyenne. Leur action est primordiale pour éveiller les consciences à l’importance de l’écologie. Ainsi, j’ai souhaité structurer ce débat autour de personnalités, d’institutions et de parties prenantes qui exercent une influence sur l’opinion publique, à savoir les artistes, les intellectuels, les philosophes d’une part, et les journalistes et les médias d’autre part.

Je tiens tout particulièrement à remercier Pierre Rabhi de sa présence ce soir.

Un penseur éclairé et précurseur, un des prêtres de l’écologie, défendant un modèle de société plus respectueux de l’Homme et de la Nature… Nous saluons surtout votre capacité à incarner le changement. Rappelons ce que disait Ghandi : « soyez le changement que vous voulez voir dans le monde ». Imaginons la puissance de la collectivité humaine si chacun d’entre nous faisait de cette idée une doctrine.  

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Pour transformer notre société, tous les acteurs doivent s’engager. La transition écologique a besoin de figures emblématiques culturelles, spirituelles et intellectuelles. Tous les arts se mobilisent : des écrivains, des auteurs de BD, des chanteurs, des créateurs de mode, des designers, des cinéastes qui font même la clôture du festival de Cannes ! Je me félicite de l’engagement de nombreux artistes en faveur de la protection de l’environnement dont certains sont présents ici ce soir.

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki Moon l’a bien compris en nommant en septembre dernier l’acteur américain Leonardo Di Caprio « messager de la paix » des Nations Unies avec comme priorité la lutte contre le réchauffement climatique.

J’ai en outre tenu à débattre ce soir du rôle de la presse dans cette transition écologique, de la responsabilité des médias dans l’appropriation des questions environnementales et de leurs enjeux dans le débat public. Comment la presse traite-elle ces questions essentielles ? Quelle priorité leur donne-t-elle ? Quelle fonction et quelle influence les médias peuvent-ils jouer ? Les enjeux environnementaux sont souvent considérés comme des enjeux de long terme. Sommes-nous trop focalisés sur les enjeux de court terme ? Les médias ont-ils une part de responsabilité ? Très certainement, notre société est aujourd’hui dictée par l’urgence médiatique.

Si l’on se réfère aux dernières études menées en partenariat avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, la crise fait passer l’environnement au second plan des préoccupations de nos concitoyens, derrière le chômage, les impôts, … Mais tout n’est pas si manichéen, si l’on sort de la hiérarchie entre les problèmes économiques, sociaux et environnementaux, les deux tiers des Français se déclarent préoccupés par « la protection de l’environnement ».

Voilà les grands thèmes que nous aborderons ce soir.

Notre culture française a tous les atouts, toutes les richesses pour contribuer positivement à une réconciliation avec la Nature. Prenons l’exemple de notre attachement à notre patrimoine naturel. Ainsi, un paysage ou une forêt font tout autant partie de notre bien commun qu’un château ou qu’une cathédrale. Nous nous battons pour les conserver. La ruralité a toujours joué une place cruciale dans notre histoire culturelle. Les ressources naturelles doivent désormais être perçues non plus comme des ressources mais comme des biens communs.

C’était d’ailleurs le thème des dernières « Journées du patrimoine » qui associaient biens culturels et sites naturels. Le philosophe Dominique Bourg voyait d’ailleurs dans l’association entre patrimoine culturel et patrimoine naturel un « symptôme », voire la « manifestation d’une inquiétude » : « il est étonnant de voir comment on patrimonialise la nature au moment même où elle devient quelque chose de plus en plus instable ».

Nous pourrons en débattre.

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Il reste du chemin à parcourir pour aboutir à ce grand sursaut où chacun comprendra que l’écologie est LA SOLUTION pour résoudre la crise économique, sociale, environnementale et même démocratique que nous traversons. Vous, artistes, intellectuels, philosophes et médias, avez un rôle capital à jouer. Alors, oui, soyez créatifs, soyons ambitieux et audacieux. Menez cette bataille culturelle dans l’intérêt de tous les citoyens du monde. Jadis, la culture était pour certains ce qui permettait de distinguer l’Homme de la Nature. Aujourd’hui, elle doit être ce qui lui permet de s’en rapprocher.

Je vous remercie.